Sorj Chalandon : "Le jour d'avant"
Sorj CHALANDON : "Le jour d'avant"
Le grisou n'est pas une fatalité. Et pourtant le 27 décembre 1974 dans la fosse de St Amé, c'est lui qui va tuer 42 mineurs. Les mineurs du Nord, laborieux et silencieux, aristocrates du prolétariat ouvrier, savent que la mine va la dévorer. Tôt ou tard, et bien au-delà de la fatalité du grisou, ils seront mangés, usés, silicosés, rompus, détruits.
Alors, pourquoi, 40 ans plus tard, Michel, dont le frère Joseph a été victime de la catastrophe, remue t-il tout ce passé ? Cherche-t-il à venger son frère, et à travers lui toutes les victimes ? Cherche-t-il à comprendre ? A exorciser le mal ? A se reconstruire, lui qui n'a connu la catastrophe qu'indirectement, lui, fils de paysans, lui qui ne voulait pas travailler la terre mais qui se destinait à rejoindre la troupe noire des abatteurs et des boiseurs par 600 mètres de fond ?
Sorj Chalandon, dans ce roman remarquable, nous conduit, à travers les arcanes tortueuses de l'esprit de Michel, dans cet univers où se mêlent les souffrances silencieuses, le devoir accompli et la fierté, revenant peu à peu sur les évènements du jour d'avant, c'est à dire du 26 décembre. Qui mystifie qui dans cette histoire ? On découvre au fil du récit la réalité des évènements. Mais de quelle réalité s'agit-il ? Celle de Michel ou celle de l'imaginaire collectif construit à partir d'images issues de "Germinal" ?
Le lecteur se laisse emporter, berner même, par le brio de la construction. Bravo !