W. Somerset Maugham : "La passe dangeureuse"
W. Somerset MAUGHAM : "La passe dangeureuse"
Voyage en Chine au temps de l'Empire, avec ses fonctionnaires de l'administration coloniale au début du XXème siècle, mais aussi sa population locale, employée dans les maisons des européens, des mondes qui se mélangent peu. Mais là n'est pas le propos, même si le contexte est puissamment évoqué.
Fraîchement débarquée d'Angleterre après avoir précipitamment épousé Walter un médecin bactériologiste exerçant à Hong-Kong, Kitty se trouve plongée dans cet univers particulier, dans cette ambiance chaude et humide de l'extrême Asie.
Kitty n'a pas vraiment épousé Walter par amour, mais plus par l'envie rageuse de quitter sa mère et sa famille. Walter n'est que cet être terne, ce chercheur sans vie sociale, fade, presque transparent dans cette société coloniale. Kitty, oisive et insatisfaite, rencontrera Charlie, brillant, séduisant et se jette à corps perdu dans cet amour, dans cet espoir. Quand Walter découvre cette liaison il laisse à Kitty le choix, ou bien de se marier avec Charlie si c'est lui qu'elle aime, ou bien de le suivre dans un territoire reculé de la Chine où il a accepté un poste de médecin dans cet endroit touché par l'épidémie de choléra.
Et voilà le couple qui remonte les vallées, en chaises, jusqu'à ce village perdu où vivent quelques soeurs dans un couvent et où meurent chaque jour des êtres victimes de la terrible épidémie. Mise à l'épreuve Kitty découvrira là une autre facette de sa personnalité, moins futile, tournée vers autrui. Elle découvrira aussi, au détour d'événements dramatiques, la personnalité de Walter qui n'a jamais cessé de l'aimer. Transformée, Kitty prendra conscience, peut-être un peu tardivement, qu'elle est probablement passée à côté de quelque chose. Derrière le voile des illusions.
Le roman est beaucoup plus mélancolique et beaucoup moins romantique que le film "Le voile des illusions" portant magnifique. Et en lisant le roman on ne peut s'empêcher d'entendre les notes de Satie (la "Gnossiène n°1" accompagne admirablement le film) qui prennent ici toutes leur valeur. Un roman terrible sous couvert d'une histoire d'amour et d'adultère dans la bonne société coloniale britannique.